Histoire d'un cheval de bois et d'une poupée
"Ah que nous sommes malheureux" se disaient un jour le cheval de bois de Toto et la poupée de Zizi
-Moi gémissait le cheval, hier mon maître m'a coupé une oreille et puis il m'a rogné ma belle crinière pour s'en faire un balai!
-"Et moi donc interrompait la poupée, je suis sans cesse battue!...et plusieurs fois déja j'ai dû être recousue un peu partout!...
Et ils n'avaient vraiment pas tort de se plaindre, le cheval de bois et la poupée car Toto et Zizi étaient deux types achevés d'enfants gâtés. Ils ne se plaisient qu'au massacre. Leurs parents étaient riches et ne leur ménageaient pas les jouets; aussi en faisaient-ils une terrible consommation!
-Se lassera-ton enfin de nous" se disaient à quelque temps de là les deux compagnons d'infortune de nouveau réunis.
le cheval n'avait plus que trois pattes et la poupée ne pouvait plus se tenir debout, ayant eu les reins cassés:
- Daigne petit Noël, notre saint patron, nous accorder nos invalides aprs tant de traverses! "
Et de fait comme si petit Noël eut exaucé leur prière, des le soir même un domestique vint les prendre et les emporta au grenier où il les déposa dans un coin sombre parmi une foule de débris du même genre.
Le cheval de bois et la poupée se félicitèrent d'abord de jouir d'un aussi bon repos...
...et puis à la longue ils s'en lassèrent...
Et le cheval de bois se remit à gémir :
-quel silence désolant , disait-il quelle monotonie désespérante! On ne vit pas ici on végète misérablement!
Et la poupée de répliquer du même ton:
-C'est comme moi, je préfèrerais mille fois être battue comme jadis, plutôt que d'être délaissée ainsi!
Mais comme petit Noël ne voulait sans doute plus les entendre, les trouvant inconstants dans leurs désirs, ils demeuraient là, immobilies sous la poussière, parmi les débris et les rebus où d'affreuses araîgnées tissaient leurs toiles.
Et puis ils se lassèrent même de se plaindre et s'engourdirent dans une moren torpeur. Mais voivi qu'un jour ils furent réveillés par de joyeux éclats: un petit garçon et une petite fille faisaient invasion dans le grenier et se précipitaient vers eux avec tous les signes du plus grand ravissement.
C'étaient deux enfants à qui leurs parents, peu aisés ne pouvaient acheter de jouets et qui se trouvaient trop heureux qu'on leur permit de choisir parmi ceux dont ne voulaient plus Toto et Zizi.
Réparés, dorlotés, ménagés avec le plus grand soin la poupée et le cheval de bois revirent des jours meilleurs; ils étaient heureux, ce qui passe à bon droit pour le comble de la félicité."
Cette simple histoire vous donne divers enseignements: d'abord que toute condition a ses plaisirs vu qu'ici bas tout
est relatif-Ensuite que ,vivr c'est agir; témoins le cheval et la poupée qui en étaient à préférer même leurs souffrances à l'inaction- Enfin, qu'il ne faut jamais se laisser décourager par
l'adversité car il n'est pas de misère sans fin, de peine sans consolation et que c'est par la vaillance qu'on se rend le plus digne des retours heureux.
imagerie d'Epinal N° 374
Merci de garder à ce texte son originalité, son côté désuet, ses conjugaisons à l'ancienne...